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Les champions nationaux burkinabés à l’assaut du continent

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Depuis une vingtaine d’années, les entreprises burkinabés montrent leurs résiliences avec une stratégie d’expansion bien rodé en s’implantant dans toute l’Afrique de l’Ouest.

Zoom sur deux d’entre elles : EBOMAF (leader du BTP en Afrique de l’Ouest) et Coris Bank

De quelle manière les champions nationaux burkinabé sont-ils devenus des champions continentaux ?

A première vue, le Burkina Faso semble être dans une posture défavorable dans la course aux marchés ouest-africains. Face à des économies beaucoup plus dynamiques comme la Côte d’Ivoire et le Sénégal ainsi que la présence de bon nombre d’entreprises extra-africaines, on voit mal comment les compagnies du pays des hommes intègres peuvent tirer leurs épingles du jeu. Et pourtant malgré des désavantages économiques et stratégiques multiples, l’impulsion lancée sous la présidence Sankara et poursuivie par tous les gouvernements successifs visant à promouvoir une préférence nationale a eu des résultats notables.

Concrètement cela se traduit par une expansion des entreprises burkinabés sur le marché prometteur de l’Afrique de l’Ouest qui par son potentiel peut émerger comme la locomotive économique du continent. L’exemple de EBOMAF et de Coris Bank offre une perspective particulièrement instructive en la matière.

Afin de mieux comprendre ce phénomène, il convient de revenir succinctement sur l’histoire de ces deux sociétés. Fondée dans les années 80 par Mahamadou Boukoungou, la compagnie se spécialise initialement dans la réalisation de forages hydrauliques et la fourniture d’équipement techniques avant d’étendre son champ d’action au secteur de la construction : trottoirs de Ouagadougou, routes, autoroutes, ponts, aéroports, etc.

La modeste entreprise familiale s’est transformée en un géant africain du BTP profitant de nombreux contrats issus d’appels d’offres avantageux.

En effet, depuis Thomas Sankara, les gouvernements successifs burkinabés ont mené une politique de « préférence nationale » favorisant les entreprises burkinabés dans les appels d’offres nationaux de constructions et de fournitures d’équipements.

Ses deux sociétés, bénéficie d’une nouvelle forme burkinabé de partenariats publics-privés, partout où le Burkina Faso est présent au travers de sa diplomatie, de sa diaspora ses entreprises emboîtent le pas et partent à la conquête de nouveaux marchés !

Pour Coris Bank, une ascension météorique a propulsé le groupe au premier rang des firmes bancaires d’Afrique de l’Ouest sur la dernière décennie. En 2017, elle se plaçait au 7 ème rang des banques de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa), dépassant des géants comme BNP Paribas dans la région.

La stratégie de l’entreprise fondée sur une clientèle de PME et TPE et une expansion agressive à l’échelle régionale au Togo, au Sénégal, au Bénin, en Côte d’Ivoire et au Mali tout en consolidant sa position au Burkina Faso lui a permis d’émerger comme un concurrent sérieux pour bon nombres d’acteurs financiers dans la région. Le jeu de Coris Bank n’hésitant pas à se placer à la bordure avec les échanges informels voire au-delà dénote une volonté de prise de risque accrue avec à la clé des retours sur investissement plus important mais aussi peut être une démonstration de force sur la capacité des burkinabés à innover et entreprendre.

Face à la complexification du secteur bancaire africain et une concurrence accrue, le « local spirit » de Coris Bank lui permettait de s’implanter aisément, là où des banques comme BNP Paribas où Société Générale plie bagage. L’expansion de firmes comme Coris Bank dans le reste du Sahel notamment au
Niger n’est guère le fruit du hasard.

La banque illustre également le changement de paradigme vers une préférence régionale au Burkina Faso qui se traduit par un appui financier sur le modèle des Eximbank , particulièrement turques et chinoises ainsi qu’un soutien diplomatique. L’influence burkinabé s’est exercée pendant de nombreuses années au travers des multiples incursions militaires menées sous la présidence
Compaoré levier d’influence majeur dans une région instable. L’intégration des exécutifs des champions burkinabés au sein des nombreuses médiations diplomatiques engagées par le pays est un facteur majeur dans leur expansion.

Un autre élément crucial à ne pas ignorer est la diaspora burkinabé forte d’une présence importante dans le nord de la Côte d’Ivoire qui fait figure de moteur de l’Afrique francophone. Les entreprises du Burkina peuvent donc compter sur des marchés plus accessibles à l’export dans les pays disposant d’une forte communauté burkinabé. En Côte d’Ivoire, ils sont au moins 3,5 millions d’après le recensement de 2014, étant de loin la principale communauté étrangère, un facteur à ne pas négliger et un avantage notable pour le Burkina Faso dans un contexte d’accroissement de la compétition sur ses entreprises nationales.

Face à une concurrence étrangère rude et accrue depuis le début des années 2000, le Burkina Faso doit plus que jamais faire preuve d’ingéniosité afin d’accompagner leurs champions nationaux dans leurs projets d’expansion.

Le secteur du BTP dans une région qui connaît une forte urbanisation est particulièrement concurrentiel, EBOMAF a su montrer qu’avec du matériel local et du personnel africain il est possible de concurrencer les géants mondiaux avec des coûts de constructions plus compétitifs et une qualité qui n’a rien à envier aux leaders mondiaux.

La montée en puissance d’entreprises turques et chinoises dans la région à l’image de Summa, le conglomérat de Selim Bora ou encore du géant CITIC côté chinois, n’a pas freiné les ambitions d’EBOMAF.

Cette concurrence accrue pour les entreprises burkinabés s’exerce aussi dans le secteur financier qui en plus de l’implantation historique de banques françaises, se trouve renforcée par l’émergence de banques comme UBA ou Ecobank, fleurons du lion nigérian ainsi que par la ruée vers le sud de firmes marocaines à l’image de Attijariwafa Bank et BMCE Bank of Africa. Les banques marocaines ont su en effet profiter du déclin relatif de l’influence française dans la région pour endosser le rôle de pilier du système financier régional.

Malgré ces contraintes supplémentaires, l’ascension de groupes comme Coris Bank montre qu’il y a une place pour les entreprises burkinabés dans cet environnement compétitif et le succès de longterme de EBOMAF dénote la résilience des compagnies burkinabés qui disposent d’un atout dont peu d’entreprises disposent, celui de connaître parfaitement le terrain et d’être compétitif avec des compétences 100% africaine.

La position de l’Afrique de l’Ouest comme pôle central dans l’économe continentale et l’émergence d’un entrepreneuriat burkinabé de premier plan font des champions du pays des hommes intègres des poids-lourds continentaux avec le potentiel d’atteindre de nouveaux sommets et d’y demeurer sur le
long terme. On peut citer d’autres groupes comme Planor Afrique SA fondé par Apollinaire Compaoré misant sur une diversification massive allant des télécommunications à l’hôtellerie et démontrant la diversité du paysage entrepreneurial burkinabé et son dynamisme malgré des conditions politiques et géopolitique qui perturbent et menacent le développement du pays.

Nous pouvons nous demander si la longue tradition burkinabé de soutien à ses entreprises va se poursuivre et de quelle manière, d’autres pays comme le Rwanda souhaite s’inspirer de la diplomatie économique burkinabé afin de conquérir de nouveaux marchés.

Par Kamal Benali, Vice-président du Crans Montana Forum (www.cmf.ch) et Ambassadeur de la World Diplomatic Academy.

(Doté d’une expérience de plus de 20 ans dans le monde des affaires de
l’Afrique à l’Asie en passant par le Moyen Orient. Il offre une expertise de grande valeur aux entreprises et aux gouvernements grâce à ses connaissances ciblées et sa vaste expérience de la politique publique, des entreprises et des enjeux internationaux).

EU Briefs publie des articles provenant de diverses sources extérieures qui expriment un large éventail de points de vue. Les positions prises dans ces articles ne sont pas nécessairement celles d'EU Briefs.

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