Depuis quelques jours, le Soudan vit de nouvelles heures sombres de son histoire. Alors que depuis plusieurs mois, le pouvoir avait tout mis en œuvre pour construire la transition civile, une nouvelle crise a éclaté au sein du pouvoir entre le président Al Buhrane, organisateur du putch de 2021 qui avait porté l’armée au pouvoir, et a vu l’arrivée de Mohamed Hamdan Daglo (Hamedti), vice-président et chef des Forces de Soutien Rapide.
Aujourd’hui, ce dernier reproche au premier d’avoir mis le pays en danger.
Deux jours après le début de la crise, il l’a qualifié dans un récent tweet de « dangereux extrémiste islamiste qui bombarde les civils depuis les airs« . Il l’accuse également de poursuivre l’œuvre de l’ancien tyran, Omar el-Béchir, et de tout faire pour empêcher la transition civile de se dérouler au plus vite.
Menacées par l’armée ces derniers jours, les Forces de soutien rapide de Hamedti, qui cherchent depuis de nombreux mois à sécuriser la transition politique, ont décidé de prendre le contrôle du Palais présidentiel, de l’aéroport de Karthoum et entendent s’emparer de toutes les bases militaires du pays.
Depuis plusieurs semaines, la tension monte entre les deux hommes : MHD, qui a longtemps cherché à se ranger du côté des civils, accusant Al Buhrane de mettre le pays en danger en retardant toutes les dernières étapes qui auraient dû aboutir à un accord final il y a plusieurs semaines.
Aujourd’hui, le RSF a étendu son contrôle et cherche à mettre fin au pouvoir de l’ancien président, jusqu’au commandement de l’armée et à la maison d’Al Buhrane. MHD a récemment accusé le président d’utiliser des éléments d’Al-Qaïda et de l’État islamique pour aider l’armée régulière à vaincre ses forces. Pire encore : Al Buhrane aurait récemment libéré de dangereux terroristes des prisons d’Omar el-Béchir et des prisonniers pour qu’ils combattent les FAR. M. Hamedti a appelé la communauté internationale à réagir à ces dangereux abus de pouvoir.
Ces deux derniers jours, l’armée régulière a utilisé des avions de guerre et tiré à l’artillerie lourde directement sur des zones résidentielles densément peuplées.
La RSF affirme avoir abattu de nombreux avions de guerre et s’être emparée de 200 chars pour les neutraliser. Les premières victimes du gouvernement sont désormais les civils pris entre deux feux. On parle désormais de plusieurs morts. Des corridors humanitaires ont été ouverts dimanche pour faciliter l’évacuation des civils dans les plus brefs délais.
L’ensemble de la communauté internationale est préoccupée par la situation et appelle à un retour au calme. Aujourd’hui, les ministres des affaires étrangères du G7 se réunissent au Japon et devraient discuter de la situation actuelle au Soudan. Le secrétaire d’État américain, Anthony Blinken, a appelé à un « cessez-le-feu immédiat et à un retour aux pourparlers« . L’Union africaine se rend sur place pour tenter une médiation entre les parties.
Il est en effet urgent de revenir au calme d’une part, mais aussi de reprendre sur de nouvelles bases solides, le dialogue national et le processus de transition civile mis en péril depuis plusieurs jours.
Paul CHEVALIER