Un ancien espion saoudien a accusé jeudi le prince héritier saoudien Mohammad ben Salmane, dit « MBS », d’avoir tenté de l’assassiner en 2018, peu après le meurtre du journaliste dissident Jamal Khashoggi en Turquie.
Dans une plainte déposée jeudi devant un tribunal de Washington, Saad Aljabri accuse MBS d’avoir envoyé une équipe de tueurs au Canada, où il vit en exil, pour le tuer et le démembrer de la même façon que M. Khashoggi. « Pour satisfaire ses envies de meurtre, l’accusé ben Salmane a personnellement orchestré une tentative d’exécution extrajudiciaire contre M. Saad, une tentative encore en cours à ce jour », indique la plainte. Saad Aljabri affirme que le prince héritier saoudien veut sa peau parce qu’il est proche du prince Mohammad ben Nayef, dont MBS a pris la place comme héritier du trône. Il accuse aussi le prince de vouloir le faire disparaître parce qu’il en sait trop sur ses activités.
« M. Saad est dans une position unique pour représenter une menace existentielle pour l’image de ben Salmane auprès du gouvernement américain », note le document légal. « C’est pour ça que l’accusé ben Salmane veut sa mort ».
Saad Aljabri était déjà à l’étranger en juin 2017 lorsque Mohammad ben Salmane a pris le pouvoir et assigné le prince Mohammad ben Nayef à résidence. L’ancien espion a refusé de revenir dans le royaume, craignant d’y subir le même sort. Il s’est installé au Canada, où vit un de ses fils et selon lui, une équipe d’assassins saoudiens a été envoyée aux Etats-Unis pour le rechercher.
Selon ses dires, 13 jours après l’assassinat de Khashoggi le 2 octobre 2018, une équipe que Saad Aljabri qualifie de « mercenaires personnels » du prince héritier est arrivée au Canada. Mais les services de sécurité canadiens leur ont refusé l’entrée sur le territoire, trouvant leur comportement suspect. Il affirme que le groupe comprenait des experts en médecine légale et des équipements similaires à ceux du groupe accusé d’avoir étranglé puis découpé en morceaux le corps de Jamal Khashoggi dans le consulat d’Arabie Saoudite à Istanbul. Les restes du collaborateur du Washington Post et critique du régime saoudien n’ont jamais été retrouvés. Saad Aljabri ajoute qu’en mars dernier, deux de ses enfants vivant encore en Arabie Saoudite ont été kidnappés. Il ne les a jamais revus.
L’ancien espion, qui dit avoir développé au cours des années des relations étroites avec la CIA, invoque la loi américaine sur la protection des victimes de torture pour demander des comptes au régime saoudien.
L’ambassade d’Arabie saoudite à Washington, contactée par l’AFP, n’a pas fait de commentaire.
AFP