« Comme on ne sait pas comment ça va se passer on préfère y aller maintenant »: les Français se précipitaient dans les magasins lundi afin de compléter leur garde-manger, craignant un confinement total face à l’épidémie de coronavirus.
Fini les promenades et les pique-niques dans les parcs ensoleillés, lundi, les habitants d’Ile-de-France se dépêchaient de faire leurs courses, avant un éventuel confinement. A Maisons-Alfort, dans le Val-de-Marne, des files interminables se sont formées à chacune des caisses, toutes ouvertes, d’un supermarché Auchan.
« Y’a pas un mètre là, c’est très dangereux », s’exaspère un homme, les lunettes recouvertes de buée à respirer dans son masque chirurgical. Plus loin, une femme venue avec sa fille faire un « ravitaillement d’appoint », confie attendre depuis plus de 30 minutes de pouvoir régler ses courses.
Malgré l’affluence, les rayons restent dans l’ensemble bien achalandés. Plus de papier toilette, moins de choix de pâtes et de conserves, mais de quoi remplir tout de même les chariots.
Même scénario ailleurs en France: à Lyon, comme à Strasbourg, des dizaines voire des centaines de personnes patientaient devant certaines grandes surfaces, qui régulaient le nombre de clients présents à l’intérieur.
Dans chaque ville, la situation semblait toutefois normale dans d’autres supérettes et grandes surfaces.
« Comme on ne sait pas comment ça va se passer on préfère y aller maintenant, histoire d’être sûrs de ne pas manquer », explique Olivier, un client de 41 ans qui attend patiemment devant la grande surface Ile Napoléon, à Illzach, en banlieue de Mulhouse (Haut-Rhin), zone où l’épidémie est particulièrement active.
Le président Emmanuel Macron va de nouveau s’exprimer lundi soir sur la situation en France, ce qui alimente les spéculations sur un confinement total du pays.
Pour l’heure, les Français sont encouragés à rester chez eux et tous les lieux « non indispensables » sont fermés. Les commerces alimentaires font partie de ceux autorisés à rester ouverts.
« J’aimerais acheter du ravitaillement pour deux semaines, pour éviter les contacts, d’avoir à sortir et pour rester à la maison le plus possible », raconte à l’AFP Sophie Japaridze, rencontrée au centre commercial Rivétoile à Strasbourg.
« Je ne panique pas mais j’ai conscience de la situation, j’essaye juste d’être raisonnable et de suivre les recommandations données par les autorités sanitaires », ajoute cette Strasbourgeoise de 39 ans, originaire de Géorgie, masque sur le visage.
– Effet d’entraînement –
« Comme les gens se projettent à être confinés pendant des semaines, ils se disent qu’il faut faire des réserves », commente auprès de l’AFP Pascale Hébel, directrice du pôle consommation du Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (Crédoc). Certains n’avaient pas anticipé jusqu’à présent et font leurs courses maintenant, tandis que d’autres sont poussés à acheter par imitation, en voyant la ruée dans les magasins, selon la spécialiste.
L’épidémie va conduire à une augmentation des ventes de grande consommation de 10 à 15% dans les pays touchés par le virus, selon une étude du cabinet BCG.
En France, rien que sur la semaine du 2 au 8 mars, les ventes en magasin ont bondi de 8,1% et celles en ligne (drive et livraisons à domicile) de 31,2% selon le cabinet Nielsen.
Pâtes, conserves mais aussi produits d’hygiène et ménagers: les clients s’arrachent tout ce qui peut se garder.
« D’autres pays sont moins autosuffisants, mais en France, il n’y a pas de raisons de s’inquiéter pour l’alimentation », estime Mme Hébel.
On dispose de stock et les industries continuent de produire des denrées », souligne-t-elle, en particulier de première nécessité comme le pain.
Pour freiner les ardeurs des acheteurs une seule solution: communiquer et les rassurer.
Comme des patrons de grandes surface, le ministre de l’Agriculture Didier Guillaume a martelé lundi qu’il n’y avait pas de pénurie alimentaire en France face aux perturbations liées à la propagation du virus.
Il a également appelé les Français à ne pas faire de réserves excessives. Car c’est ce type de comportement qui peut provoquer des ruptures temporaires de certains produits.
AFP