Ce puissant général a été tué à Bagdad lors d’un raid américain ordonné par Donald Trump.
Mis à jour le 03/01/2020 | 09:45
publié le 03/01/2020 | 08:28
Re-publié le 03.01.2020 10:06 20minutes
Le puissant général iranien Qassem Soleimani, émissaire de la République islamique en Irak, a été tué, vendredi 3 janvier, dans un raid américain à Bagdad, une « escalade extrêmement dangereuse » selon l’Iran, qui intervient trois jours après l’attaque inédite contre l’ambassade américaine. C’est « la plus importante opération de ‘décapitation’ jamais menée par les Etats-Unis, plus que celles ayant tué Abou Bakr al-Baghdadi ou Oussama Ben Laden », estime Phillip Smyth, spécialiste américain des groupes chiites armés, interrogé par l’AFP. Franceinfo dresse le portrait de cette figure du régime iranien.
Un chef militaire ennemi de l’Irak
Qassem Soleimani est né en 1957 dans une famille d’agriculteurs pauvres de Rabor, dans l’est de l’Iran, selon son autobiographie citée par The Guardian. Enrolé en 1979, il dirigeait la Force Qods des Gardiens de la révolution, une unité d’élite chargée des opérations extérieures de la République islamique d’Iran depuis 1998. Selon le New York Times (en anglais), il s’est distingué pour la première fois lors de la guerre Iran-Irak, entre 1980 et 1988, en menant des missions de reconnaissance derrière les lignes ennemies.
« Pour lui, cette guerre ne s’est jamais terminée », estimait auprès du quotidien américain l’ancien ambassadeur en Irak, Ryan Crocker. « Aucun être humain ne peut traverser un conflit semblable à la Première guerre mondiale sans être profondément affecté. Son objectif stratégique a toujours été une victoire complète sur l’Irak, et si ce n’était pas possible, de créer et d’influencer une faible Irak. »
Une personnalité influente du régime iranien
Pour ses partisans comme pour ses détracteurs, Qassem Soleimani, qui a joué un rôle important dans le combat contre les forces jihadistes, était l’homme-clé de l’influence iranienne au Moyen-Orient, où il a renforcé le poids diplomatique de Téhéran, notamment en Irak et en Syrie, deux pays où les Etats-Unis sont engagés militairement. Il avait par exemple raconté avoir passé au Liban, avec le Hezbollah chiite libanais, l’essentiel du conflit israélo-libanais de l’été 2006, dans un entretien exclusif diffusé par la télévision d’Etat iranienne en octobre 2019.
L’homme a déployé notamment ses talents en Irak. A chaque développement politique ou militaire dans ce pays, il a fait le déplacement, pour agir en coulisses et, surtout, en amont. Percée du groupe Etat islamique (EI), référendum d’indépendance au Kurdistan ou aujourd’hui formation d’un gouvernement… A chaque fois, il a rencontré les différentes parties irakiennes et défini la ligne à tenir, affirment différentes sources qui ont assisté à ces réunions, toujours tenues dans le plus grand secret.
A la BBC, l’ancien ambassadeur américain Ryan Crocker en Irak et en Afghanistan a raconté à quel point, dans ces deux pays, les Iraniens avec lesquels il échangeait se reposaient sur Soleimani. « Mes interlocuteurs iraniens sur l’Afghanistan étaient très clairs sur le fait que même s’ils informaient le ministère des Affaires étrangères, au bout du compte c’était le général Soleimani qui prendrait les décisions », confiait-il en 2013. Selon le New York Times, il était réputé proche du guide suprême iranien, l’ayatollah Ali Khamenei et considéré comme un potentiel futur leader du pays.
Un personnage hautement médiatique
Cet homme de 62 ans à la barbe poivre et sel était aussi devenu ces dernières années une véritable star en Iran avec de très nombreux followers sur son compte Instagram, bloqué après des sanctions américaines. Après être resté dans les coulisses pendant des décennies, Qassem Soleimani a commencé à faire la une des médias après le début du conflit en Syrie en 2011, où l’Iran, poids lourd chiite de la région, apporte une aide précieuse au régime de Bachar Al-Assad. Il est ainsi apparu sur des photos sur le champ de bataille, dans des documentaires et a même été représenté dans un film d’animation et une vidéo musicale.
« Pour les chiites du Moyen-Orient, c’est un mélange de James Bond, Erwin Rommel et Lady Gaga », écrivait l’ancien analyste de la CIA Kenneth Pollack dans son portrait de Soleimani pour le numéro du magazine américain Time consacré aux 100 personnalités les plus influentes du monde en 2017. Selon une étude publiée en 2018 par IranPoll et l’université du Maryland, 83% des Iraniens interrogés avaient une opinion favorable de Soleimani, classé devant le président Hassan Rohani et le chef de la diplomatie Mohammad Javad Zarif.
Source : Franceinfo avec AFP