À la veille des élections législatives en Géorgie, les tensions sont à leur comble, avec des inquiétudes croissantes que les résultats pourraient plonger le pays dans l’agitation et la violence.
Prévue pour le samedi 26 octobre, cette élection cruciale pourrait déterminer l’alignement de la Géorgie sur la scène mondiale, soit en sécurisant sa trajectoire européenne, soit en la poussant fermement dans la sphère d’influence de la Russie.
Le parti au pouvoir en Géorgie, Rêve géorgien, fait face à des pressions pour respecter le résultat des élections s’il perd, faisant écho à un précédent établi en 2012, lorsque le Mouvement national uni (MNU) du président de l’époque, Mikhaïl Saakachvili, a cédé le pouvoir pacifiquement. Aujourd’hui, cependant, beaucoup ne savent pas si Rêve géorgien suivra le mouvement. Dans un climat politiquement chargé, avec l’influence des médias russes et les campagnes de désinformation alléguées par les observateurs, les enjeux sont plus élevés que jamais.
L’intérêt de la Russie pour ces élections est indéniable, les analystes suggérant que le Kremlin vise à perturber le cours pro-européen de la Géorgie et à provoquer des troubles civils, entraînant la Géorgie plus profondément dans son influence.
Escalade des tensions politiques
Malgré un début de campagne serein, les dernières semaines ont été marquées par une augmentation significative des frictions politiques. À l’approche du jour des élections, l’atmosphère politique tumultueuse de la Géorgie s’est intensifiée. L’électorat géorgien est plus mobilisé qu’il ne l’a été depuis plus d’une décennie, motivé par la possibilité de ramener le pays vers une voie orientée vers l’Occident.
Les tactiques de campagne de Rêve géorgien ont notamment suscité un débat politique, avec des accusations de techniques de propagande à la russe et de récits clivants. Les promesses d’une récupération rapide des territoires occupés par la Russie – l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud – ont été remises en question, les critiques affirmant que le gouvernement fait des promesses vides sans détailler les méthodes réalisables pour récupérer ces régions.
Changement de soutien et mécontentement du public
Des sondages récents d’Edison Research et de SAVANTA suggèrent que le soutien à Rêve géorgien oscille autour de 34-35 %, un chiffre qui est en deçà du seuil requis pour obtenir une majorité parlementaire. Cela est dû en partie aux récentes réformes électorales, qui ont éliminé la composante majoritaire qui profitait auparavant au parti au pouvoir.
Selon les sondages, les quatre principales coalitions d’opposition devraient recueillir collectivement environ 52 à 53 % des voix, ce qui ouvrirait la voie à un éventuel gouvernement de coalition s’ils parvenaient à un consensus après les élections.
La position pro-européenne de l’opposition, mise en évidence par un grand rassemblement intitulé « La Géorgie choisit l’Union européenne », a attiré des foules jamais vues depuis des années, indiquant une base de soutien substantielle. En réponse, Rêve géorgien a mobilisé des employés du secteur public pour un contre-rassemblement, mais la distinction entre ces deux événements, l’un spontané, l’autre imposé, a suscité des critiques dans le pays.
Allégations de manipulation des élections
Rêve géorgien a rejeté les conclusions d’agences de sondage reconnues, citant plutôt des données de Gorby, une organisation de sondage à la réputation controversée. Gorby prévoit une victoire écrasante de 60,2 % pour le Rêve géorgien, ainsi que des affirmations selon lesquelles seules deux coalitions d’opposition atteindraient le seuil électoral. Ces chiffres contrastent fortement avec les évaluations internationales, ce qui fait craindre une potentielle manipulation des élections.
Dans un récent discours, le fondateur de Rêve géorgien, Bidzina Ivanichvili, est apparu inhabituellement tendu, faisant allusion à sa conscience de la frustration du public à l’égard du régime actuel. Ivanichvili, qui conserve une influence significative, a souligné que son parti restait essentiel pour la stabilité de la Géorgie, rejetant les partis d’opposition comme des forces déstabilisatrices.
Ses remarques reflétaient un mélange d’assurance et de dédain envers d’anciens collègues devenus des leaders de l’opposition, comme l’ancien Premier ministre Giorgi Gakharia, qu’il a qualifié de déloyal et de corrompu.
Les déclarations d’Ivanichvili, parsemées d’affirmations sur une croissance économique record et un faible taux de chômage sous le règne de son parti, ont été tempérées par des griefs concernant sa situation financière personnelle, qui, selon lui, a été restreinte en raison d’une ingérence occidentale présumée.
Le rôle de la présidente Salomé Zourabichvili
Alors que le Rêve géorgien fait face à des défis internes, la présidente Salomé Zourabichvili est devenue une figure de proue de l’opposition, plaidant pour un avenir pro-européen. Elle a favorisé une unité sans précédent entre les factions de l’opposition, qui a abouti à la signature de la « Charte géorgienne », qui définit une vision commune de la gouvernance du pays après les élections.
Ce document met l’accent sur les réformes démocratiques et l’engagement en faveur de l’intégration européenne, plaçant Zourabichvili dans un rôle crucial de médiateur entre les factions.
Parmi les noms qui circulent comme premiers ministres potentiels dans le cadre d’une coalition alignée sur Zourabichvili figurent Nika Gilauri, un ancien Premier ministre, Gela Bezhuashvili, ancien ministre des Affaires étrangères, et Victor Kipiani, chef du groupe de réflexion Geocase. Le choix final dépend des résultats des élections et de la capacité de l’opposition à consolider sa majorité.