Le Parlement européen doit voter sur la levée de l’immunité parlementaire de Petr Bystron , député européen du parti allemand Alternative pour l’Allemagne (AfD).
Le vote fait suite à une recommandation de la commission des affaires juridiques du Parlement européen, qui a conclu qu’il existait des motifs suffisants pour lever l’immunité de Bystron dans le cadre d’une enquête criminelle ouverte par les autorités judiciaires allemandes.
Le vote en plénière, prévu lors de la session prévue du 31 mars au 3 avril, se déroulera à bulletin secret. Si cette décision est approuvée, le parquet allemand pourrait engager des poursuites judiciaires contre l’eurodéputé, membre du groupe « Identité et Démocratie » du Parti conservateur et réformiste européen (CRE) au Parlement.
L’affaire porte sur des allégations liées à la diffusion d’images interdites par la législation allemande. Selon un rapport soumis par la commission des affaires juridiques, la demande de levée de l’immunité de Bystron a été initialement déposée par le ministère fédéral allemand de la Justice le 27 août 2024, à la demande du parquet général de Munich. L’affaire concerne un incident remontant à juillet 2022, lorsque Bystron, alors député au Bundestag allemand, a publié sur les réseaux sociaux une image modifiée numériquement représentant de hauts fonctionnaires allemands effectuant le salut nazi.
Le montage faisait suite au limogeage de l’ambassadeur d’Ukraine en Allemagne, Andriy Melnyk, et mettait en scène des personnalités telles que l’ancienne chancelière Angela Merkel et l’actuel chancelier Olaf Scholz, avec la légende : « Adieu Melnyk ! Des politiciens allemands vous font signe d’adieu. » L’image, qui faisait référence à un geste interdit par le code pénal allemand, a donné lieu à une enquête officielle. Le Bundestag a levé l’immunité de Bystron le 7 septembre 2023, mais l’enquête a été suspendue après son élection au Parlement européen.
Le rapport de la commission, préparé par le député européen polonais Dominik Tarczyński au nom de la commission des affaires juridiques, indique que les allégations relèvent des dispositions du Code pénal allemand concernant l’utilisation de symboles d’organisations inconstitutionnelles et terroristes. Après avoir tenu une série d’auditions impliquant Bystron, la commission a conclu qu’il n’existait aucune preuve suggérant que l’affaire était motivée par des considérations politiques. Elle a également noté que les actes faisant l’objet de l’enquête avaient eu lieu avant le mandat de Bystron en tant que député européen et n’étaient pas liés à ses activités au Parlement européen.
La demande de levée d’immunité est de nature procédurale et n’implique pas de jugement sur la culpabilité ou l’innocence du député. Elle permet aux autorités judiciaires nationales de poursuivre leur action sans la protection juridique offerte par le statut parlementaire.
Par ailleurs, des enquêtes médiatiques ont lié Bystron à la plateforme prorusse Voice of Europe. Selon un article de Die Zeit , réalisé en collaboration avec ARD et plusieurs autres médias européens, Bystron et son collègue de l’AfD, Maximilian Krah, faisaient partie d’un groupe d’individus soupçonnés d’avoir reçu des compensations financières pour la promotion de contenus sur la plateforme. L’enquête suggère que des paiements à des responsables politiques européens pourraient avoir atteint jusqu’à 2 millions d’euros.
Ces conclusions, bien que sans rapport avec la procédure d’immunité en cours, viennent renforcer l’examen de la conduite et des affiliations politiques de Bystron. Ce dernier a précédemment nié les allégations de mauvaise conduite en lien avec Voice of Europe.
La décision du Parlement européen de procéder au vote sur l’immunité souligne l’engagement de l’institution à respecter les cadres juridiques de ses États membres tout en garantissant que les députés européens ne soient pas injustement protégés des poursuites pour des actes commis en dehors du cadre de leurs fonctions parlementaires.
Si l’immunité est levée, le parquet allemand pourrait reprendre l’enquête contre Bystron devant le tribunal de grande instance de Munich. L’issue de l’enquête et toute éventuelle procédure judiciaire seraient alors régies par le droit allemand, indépendamment de l’intervention du Parlement européen.
Bystron, figure emblématique de l’AfD, critique ouvertement la politique étrangère allemande envers l’Ukraine et est connu pour son alignement sur les positions nationalistes et souverainistes au sein du Parlement européen. Son parti, Alternative pour l’Allemagne, a été critiqué tant au niveau national qu’européen pour sa position envers la Russie et son opposition aux sanctions imposées suite à l’invasion de l’Ukraine.
Le Parlement européen maintient que la levée de l’immunité dans de tels cas est une question de procédure, destinée à garantir une application uniforme et sans préjugés de la loi. Le résultat du prochain vote déterminera si les autorités allemandes peuvent poursuivre leur enquête.