Le coordonnateur humanitaire des Nations Unies au Soudan a publié une ferme déclaration vendredi, appelant les deux parties à la lutte pour le pouvoir militaire à « mettre en œuvre des pauses humanitaires » permettant aux civils et aux travailleurs humanitaires d’accéder aux fournitures essentielles.
« Je suis horrifié par le bilan des affrontements sur les civils », a déclaré Abdou Dieng. « Au moins 331 personnes ont été tuées dans tout le pays, dont cinq travailleurs humanitaires, et près de 3 200 ont été blessées ».
Les affrontements entre les forces armées soudanaises et le groupe paramilitaire, les Forces de soutien rapide (RSF) ont éclaté il y a six jours et ont eu un impact dévastateur sur la vie des civils et sur l’importante opération d’aide humanitaire en cours à travers le Soudan.
Les dernières informations indiquent que les bombardements, les tirs d’obus et les fusillades se poursuivent sans relâche, en particulier dans la capitale Khartoum, et l’agence des Nations Unies pour les migrations (OIM) a signalé vendredi que l’un de ses employés avait été victime de la violence.
Un employé de l’OIM tué
« C’est avec le cœur lourd que je confirme la mort d’un membre dévoué du personnel de l’OIM au Soudan ce matin, après que le véhicule dans lequel il voyageait avec sa famille au sud d’El Obeid ait été pris dans un feu croisé entre deux parties belligérantes », a déclaré le directeur général de l’OIM,
Il a ajouté que l’employé laissait derrière lui une femme et un nouveau-né, « et que notre équipe au Soudan était en deuil ».
« La sécurité de l’ensemble du personnel de l’OIM est ma priorité absolue. Nous continuons à travailler avec nos partenaires des Nations Unies pour mettre à jour notre réponse en matière de sécurité », a-t-il assuré.
Trois employés du Programme alimentaire mondial (PAM) ont aussi perdu la vie dans le nord du Darfour dès le début de l’affrontement militaire samedi.
M. Vitorino a déclaré que la dernière flambée de violence a contraint l’OIM à suspendre ses opérations humanitaires au Soudan.
« L’OIM opère au Soudan depuis 2000, répondant aux besoins humanitaires complexes du pays où l’on estime à 3,7 millions le nombre de personnes déplacées à l’intérieur du pays », a poursuivi le chef de l’OIM.
Quelque 15,8 millions de personnes au Soudan, soit un tiers de la population, avaient besoin d’une aide humanitaire avant le début des combats de cette semaine.
Crise de l’alimentation, de l’eau et des soins de santé
M. Dieng a déclaré que même de courtes pauses convenues dans les combats intenses entre les factions rivales, qui ont jusqu’à présent ignoré tous les appels au cessez-le-feu, permettraient aux civils d’avoir accès à la nourriture et à l’eau essentielles.
« L’accès aux structures de santé est également primordial. De nombreux hôpitaux ont dû fermer. Et dans ceux qui fonctionnent, les pannes de courant généralisées et le manque d’électricité exposent les patients à un risque élevé ».
Plusieurs hôpitaux tout simplement manquent de sang et d’autres fournitures vitales.
« Les attaques contre les hôpitaux, le personnel humanitaire et les installations doivent cesser », a déclaré le coordinateur humanitaire.
« Alors que nous terminons le mois sacré du Ramadan et que nous célébrons l’Aïd al-Fitr, période de paix et de réconciliation, j’appelle toutes les parties au conflit à cesser immédiatement les combats et à travailler à une résolution pacifique ».
Jeudi, le Secrétaire général des Nations Unies, António Guterres, a lancé un appel urgent en faveur d’un cessez-le-feu de trois jours pour l’Aïd, en tant que « première étape » vers une cessation permanente des hostilités, notant que les opérations humanitaires étaient devenues « virtuellement impossibles ».
Les Nations Unies disposent à elles seules d’une équipe de 4.000 travailleurs humanitaires, dont 3.200 sont des ressortissants soudanais.
Selon la dernière déclaration du bureau de coordination des affaires humanitaires de l’ONU (OCHA), il a été fait état de frappes militaires contre des établissements de santé, de détournements d’ambulances avec des patients et du personnel paramédical à bord, de pillages d’établissements de santé et d’occupation d’établissements de santé par des forces militaires.
Des pénuries de plus en plus graves
Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), les hôpitaux manquent cruellement de personnel médical spécialisé, d’oxygène et de poches de sang, tandis que le manque d’électricité et les pannes de courant exposent les patients à des risques élevés.
« Les besoins en matière de santé mentale et de soutien psychosocial augmentent rapidement, en particulier chez les enfants, à mesure que le conflit se poursuit », a indiqué OCHA.
Depuis vendredi matin, des tirs intensifs, des frappes aériennes et des bombardements ont été signalés dans différentes parties du pays, a ajouté OCHA, en particulier dans les États du Nord, du Centre et du Sud Darfour, du Nord Kordofan et dans la capitale, Khartoum.
Le 20 avril, des rapports non vérifiés faisaient état d’une intensification des affrontements à El Obeid, dans l’État du Kordofan Nord, ainsi que de troubles et de tensions croissantes à Gedaref, dans l’est du Soudan.
Solidarité avec le Soudan : ONU Femmes
La directrice exécutive d’ONU Femmes, Sima Bahous, a également publié une déclaration dans laquelle elle exprime sa vive inquiétude quant aux conséquences des combats incessants sur les femmes et les jeunes filles soudanaises.
« Comme dans toutes les crises, cela aura certainement des conséquences désastreuses et disproportionnées sur la vie des femmes et des filles soudanaises. Nous sommes solidaires du peuple soudanais et restons déterminés à le soutenir.
« La résilience des femmes soudanaises est une source d’espoir, leur rôle dans la recherche de la paix est essentiel, leur force en tant que travailleuses humanitaires, soignantes et protectrices est une source d’inspiration », a ajouté Mme Bahous.
« Nous devons tenir compte de leurs appels au cessez-le-feu et à la paix et nous engager à les soutenir dans tout ce qu’elles font ».
Elle a noté que des rapports de violence sexuelle et sexiste faisaient déjà surface, et craint « qu’ils ne deviennent de plus en plus fréquents ».
Elle a appelé les troupes gouvernementales et les milices à « veiller à ce qu’aucune femme ou fille ne soit touchée par ces crimes ».
Elle a insisté sur le fait que « chaque cas » de violence sexuelle et sexiste devait faire l’objet d’une enquête et de poursuites, sans exception.
« Le Secrétaire général des Nations Unies a appelé à un arrêt immédiat des combats pour coïncider avec l’Aïd-Al-Fitr. Cela permettra de poursuivre l’acheminement de l’aide humanitaire essentielle et de renouer le dialogue. Il a exigé le respect du droit international. Je me joins à son appel et j’exhorte toutes les parties à s’engager en faveur d’une solution pacifique », a-t-elle indiqué.