Madrid avait été condamnée pour avoir renvoyé vers le Maroc sans aucune décision administrative ou judiciaire des migrants arrivés dans l’enclave espagnole de Melilla.
L’Espagne n’a pas violé la Convention européenne des droits de l’homme en renvoyant au Maroc, sans examen individuel, des migrants qui tentaient de franchir les clôtures de l’enclave de Melilla, a conclu la Cour européenne de Strasbourg dans un arrêt rendu jeudi 13 février, qui infléchit la jurisprudence en vigueur.
Cette décision renverse un premier arrêt rendu par une autre chambre de la Cour, en octobre 2017, qui avait conclu à une violation de deux articles de la convention, sur l’interdiction des expulsions collectives d’étrangers et le droit à un recours effectif pour ces derniers.
Le 13 août 2014, deux ressortissants, malien et ivoirien, avaient tenté de pénétrer sur le territoire espagnol en escaladant les clôtures qui entourent l’enclave espagnole de Melilla, sur la côte nord-africaine. Les requérants expliquaient avoir été menottés, conduits au Maroc et remis aux autorités marocaines par des agents de la guardia civil à peine avaient-ils posé pied à terre, sans examen individuel ou assistance juridique pour une éventuelle demande d’asile ou de visa.
Les migrants « se sont eux-mêmes mis en danger »
Quinze des dix-sept juges de la grande chambre de la Cour estiment jeudi que « ce sont les requérants qui se sont eux-mêmes mis en danger en participant à l’assaut donné aux clôtures frontalières à Melilla, le 13 août 2014, en profitant de l’effet de masse et en recourant à la force ». Dès lors, elle « estime que l’absence de décision individuelle d’éloignement peut être imputée au fait que les requérants n’ont pas utilisé les procédures d’entrée officielles existant à cet effet et qu’elle est donc la conséquence de leur propre comportement ».
Concernant l’absence d’une voie de recours pour s’opposer à leur expulsion, la CEDH considère que vu ces circonstances, elle « ne saurait tenir l’Etat défendeur pour responsable de l’absence à Melilla d’une voie de recours légale qui leur aurait permis de contester ledit éloignement. »
Deux juges ont émis des opinions séparées,pour l’un « concordante », pour la seconde, « partiellement dissidente ».
Sur les réseaux sociaux, des membres d’association d’aide aux migrants se sont émus d’une décision « extrêmement décevante », jugeant qu’elle allait compromettre la garantie d’un droit à une procédure régulière pour les migrants, et encourager la pratique d’expulsions sommaires.
Source : Le Monde