La France a désigné le ministre des Affaires étrangères Stéphane Séjourné comme candidat à la prochaine Commission européenne, à la suite de la démission inattendue de Thierry Breton, qui a démissionné après s’être heurté à la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen.
Le départ de Breton ouvre un nouveau chapitre dans le remaniement du pouvoir post-électoral de l’UE, alors que les postes de direction sont distribués pour les cinq prochaines années.
La démission de Breton lundi est un geste inattendu dans une atmosphère déjà tendue après les élections européennes de juin.
Son départ a été marqué par une critique acerbe d’Ursula von der Leyen, signalant des tensions plus larges entre la France et l’Allemagne, les deux États membres les plus influents de l’UE.
La décision de Breton de démissionner est considérée comme faisant partie d’une négociation plus large du président Emmanuel Macron visant à assurer un rôle majeur à la France dans la prochaine Commission. L’objectif de Macron était clair : conserver un portefeuille puissant pour la France dans la prochaine Commission européenne malgré les défis politiques internes.
Selon des sources proches des négociations, Macron a négocié un accord pour assurer un rôle renforcé dans le marché intérieur et l’industrie pour le candidat français, avec l’autorité supplémentaire d’un poste de vice-président exécutif.
Ce poste superviserait un groupe de commissaires, ce qui permettrait à la France de rester à l’avant-garde des questions industrielles, technologiques et de compétitivité en Europe. La France, en tant que deuxième membre de l’UE, était catégorique sur le maintien d’un rôle significatif dans la nouvelle configuration de la direction de l’UE, en particulier après les résultats des élections de juin.
Le bureau de Macron a souligné ses efforts de longue date pour assurer un rôle essentiel à la Commission européenne pour la France, en mettant l’accent sur des questions stratégiques telles que la souveraineté industrielle, la technologie et la compétitivité. Dans ce contexte, la nomination de Séjourné s’inscrit dans la lignée des ambitions de Macron.
À 39 ans, Séjourné est un proche allié de Macron, connu pour sa loyauté et son leadership discret. Il est ministre français des Affaires étrangères depuis janvier, gardant un profil relativement bas tout en défendant fermement la politique de Macron. Son expérience en tant qu’ancien législateur de l’UE et son leadership lors des élections européennes de 2019 le placent bien placé pour ce rôle.
La lettre de démission de Breton dresse toutefois un portrait plus controversé des événements récents. Il a affirmé que von der Leyen avait demandé à la France de le remplacer en tant que candidat quelques jours plus tôt, offrant en retour un « portefeuille plus influent ».
M. Breton a exprimé son insatisfaction à l’égard du processus, citant une « gouvernance douteuse » dans sa lettre, ce qui l’a amené à conclure qu’il ne pouvait plus siéger à la Commission. Sa démission s’écartait clairement des attentes selon lesquelles il resterait un acteur clé au sein de la Commission.
Thierry Breton, figure de premier plan de la Commission européenne au cours des cinq dernières années, a joué un rôle déterminant dans l’élaboration des politiques essentielles de l’UE, en particulier dans les domaines de la réglementation technologique, de la stratégie vaccinale contre la COVID-19 et de la défense.
Il a attiré l’attention du public grâce à ses affrontements avec le magnat de la technologie Elon Musk et à sa position ferme sur la réglementation des Big Tech.
En tant que commissaire au marché intérieur et à l’industrie pendant le premier mandat d’Ursula von der Leyen, M. Breton a joué un rôle essentiel dans la défense de l’industrie des télécommunications, notamment en s’efforçant de faire contribuer les grandes entreprises technologiques aux coûts de la 5G et du haut débit en Europe.
Malgré ses réalisations, les relations de Breton avec von der Leyen se sont détériorées ces derniers mois. Ses critiques publiques de sa décision de briguer un second mandat en tant que candidate du Parti populaire européen (PPE) ont été un facteur important de leur brouille. Breton, un libéral, a contesté la nomination d’Ursula von der Leyen par le PPE conservateur, ce qui a encore tendu leurs relations professionnelles.
Les différends très médiatisés entre Breton et Musk et sa position sur diverses questions ont également provoqué des frictions au sein de la Commission, selon des responsables. Néanmoins, sa démission soudaine était inattendue, certains initiés suggérant qu’il était prêt à continuer son rôle dans la prochaine Commission.
Ce développement met en évidence les dynamiques de pouvoir en jeu entre la France et l’Allemagne, Ursula von der Leyen représentant l’Allemagne et Macron tentant d’affirmer l’influence de la France au sein de l’UE.
Cela survient également à un moment où Macron est confronté à des défis de politique intérieure après avoir perdu beaucoup de terrain lors des élections législatives françaises et européennes, affaiblissant ainsi sa position dans son pays.
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