Le 18 mars 2023, nous avons eu le plaisir d’inaugurer notre exposition « L’esclavage un crime contre l’humanité » en présentant les héroïnes et héros occultés de la traite transatlantique » au lycée Fridericianum dans notre circonscription électorale à Erlangen en Allemagne. L’exposition a été conçue en 2016 dans le cadre des « Black History Weeks » d’Erlangen, en collaboration avec la ville d’Erlangen, afin d’attirer l’attention sur la l’esclavage et ses conséquences historiques en Europe, en Amérique et dans les Caraïbes.
La ville d’Erlangen était représentée par deux membres du conseil municipal d’Erlangen. La chorale du lycée Fridericanium a ensuite assuré l’accompagnement musical.
L’exposition présente 20 biographies de garçons et de filles Noirs, de femmes et
d’hommes à l’époque de la traite des esclaves. Entre le 15e et le 19e siècle, des Africains ont vécu dans des plantations américaines, dans l’Empire ottoman ou dans des cours aristocratiques européennes ainsi que dans des ménages privés. Ils ont été « vendus », « donnés » «offerts» et déportés soit en Europe soit vers le nouveau monde.
Tous ces enfants Noirs portaient le titre pompeux de « pages »- ce qui est un euphémisme – comme Anton Wilhelm Amo (1703-1753), le premier Africain professeur d’université en Allemagne. Il a enseigné la philosophie à l’université de Wittenberg, Halle et Iéna la ville jumelée à Erlangen. Erlangen-Jena.
Pour la noblesse européenne de l’époque avoir un de ces petits pages était un signe de richesse et toutes les cours d’Europe se targuaient d’en possédaient.
Amo a été enlevé à l’affection de ses parents alors qu’il était enfant sur la Côte d’Or (aujourd’hui le Ghana). Il fut « offert » aux ducs et princes Anton Ulrich et Ludwig Rudolf de Lüneburg von Braunschweig-Wolfenbüttel. Il en est de même pour August Sabac El Cher, (1836-1885), pupille du prince Albrecht. En mars 1843, le prince Albrecht entreprend une expédition au Caire. Il est reçu par le vice-roi. À la fin de l’audience, ce dernier lui « offre » comme cadeau un petit garçon de sept ans.
Ces enfants volés, capturés, servaient parfois de « gages» et étaient ainsi envoyés en Europe – comme c’est le cas d’Aquasi Boachi et son cousin Kwame Poko. Ces deux enfants étaient les pages nobles du roi néerlandais Guillaume Ier et de son épouse Anna Paulowna. Aquasi Boachi a ensuite été pris en charge par la princesse de Weimar et a étudié à l’école supérieure de Freiberg, où son portrait est aujourd’hui encore accroché au musée de la ville de Freiberg.
Hermann Pückler-Muskau, un dandy de 52 ans s’est «offert» une gamine de 14 ans pour assouvir ses folies. Dans une lettre adressée à son épouse Lucie, il qualifiait Machbuba, alors mineure, de sa « concubine ». Pour apaiser la colère de son épouse, il lui apporte en « cadeau » un jeune Africain Joladour. Hermann Pückler-Muskau (1785-1871) était lui-même connu en Allemagne pour ses escapades, son goût de l’aventure et son extravagance. Il avait acquis la réputation de « Pückler le fou ». Machbuba renforçait ainsi sa réputation de dandy, car elle était jeune et belle. De retour en Allemagne, le prince a tenu Machbuba en otage au château de Muskau, à une centaine de kilomètres de Berlin. Elle y mourut seule et malade. Tous ces pages enlevés ont été rejetés en vieillissant – comme Rustimo, le page de l’impératrice autrichienne, Elisabeth, connue sous le nom de Sissi. Rustimo devait tenir compagnie à la princesse héritière Valérie et effrayer les dames de la cour par son apparence, vu qu’il avait un handicap. Il était atteint d’hydrocéphalie. Il avait une tête plus grosse que son corps. Après avoir servi de jouets aux enfants de l’impératrice une fois devenue âgée l’impératrice s’en débarrasse. Il fut interné dans un asile de pauvres où il y mourut.
L’exposition est un vibrant hommage aux victimes de l’esclavage et un appel à la lutte contre les effets persistants du racisme et de la discrimination, dont les racines remontent au passé. L’exposition vise à sensibiliser les jeunes au fait que le racisme et la discrimination sont toujours répandus, tant en Europe que dans le monde. Nous devons tirer les leçons de notre passé afin de faire de notre avenir commun un avenir exempt de racisme.
Dr. Pierrette Herzberger-Fofana,
Députée au Parlement Européen
1 ère Vice-Présidente de la Commission « Développement »
Vice-Présidente de l’Assemblée Parlementaire Paritaire ACP-UE
Vice-Présidente de la Délégation avec le Parlement Panafricain