De plus en plus sur le continent africain, notamment en Afrique Francophone ,les régimes au pouvoir utilisent les moyens déloyaux pour écarter les opposants politiques en instrumentalisant le pouvoir judiciaire .C’est la nouvelle stratégie en vogue dans plusieurs pays africains ou chaque dirigeant possède désormais soit des prisonniers politiques ou des acteurs politiques contraint de vivre en exil. C’est le recours au « Lawfare ».
Le lawfare est la contraction de deux mots anglais « law » pour « loi » et « fare » de « guerre ». Qu’est-ce que le « lawfare », ce terme utilisé par Jean-Luc Mélenchon est une méthode utilisée par le pouvoir en place pour persécuter les opposants politiques. L’ex président brésilien Lula Dasylva a été confronté à cette instrumentalisation avant sa libération récente .
Le lawfare commence avec des dénonciations sans preuves, se prolonge dans d’obsédantes campagnes de dénigrement médiatique et oblige ses cibles à d’interminables justifications sans objet. Puis c’est la prison les amendes ou l’exil .
L’utilisation de la loi pour faire la guerre aux opposants
Le lawfare enferme les débats politiques dans les cours de justice et les laboratoires des services des régimes qui gèrent la puissance publique . Pour finir, il fausse le déroulement des élections qui ne sont plus vraiment libres. Les exemples sont nombreux. Citons, en Amérique du Sud, le Brésilien Lula, condamné sans preuve et empêché de se présenter à l’élection présidentielle. Son « juge », Sergio Moro, est devenu depuis ministre de la Justice du président d’extrême droite Jaer Bolsonaro. Mais aussi l’Équatorien Rafael Correa et l’Argentine Cristina Kirchner, persécutés sans trêve. Moïse Katumbi en Rdc condamné puis empêcher de se présenter à la présidentielle, Kalifa Sall au Sénégal …
Dans la même optique nous pouvons cités en Afrique, le Mauritanien Biram Dah Abeid, emprisonné sur une dénonciation sans preuve retirée au bout de plusieurs mois de détention. Et encore l’avocat égyptien Massoum Marzouk, opposant au régime de Sissi emprisonné sur le prétexte fallacieux de charges antiterroristes. Il y a également le cas de Maurice Kamto, emprisonné sans preuve. L’ancien député gabonais Bertrand Zibi, condamné à six ans de prison, constitue entre autres un cas illustratif.
En effet à défaut d’éliminer physiquement les opposants, les pouvoirs en place en Afrique recours désormais à la méthode du lawfare. La justice est mise en coupe réglée pour inculper un opposant dans le seul et unique but de le persécuter moralement et ou de l’éloigner de la scène politique .
Aujourd’hui dans plusieurs pays Africains, on a constaté que chaque dirigeant africain en dépit de l’environnement démocratique use des méthodes moyenâgeuses pour inculper leurs opposants. Ainsi qui plus est, on remarque que certains chefs d’État ont dans leur pays instrumentalisé la justice pour avoir chacun soit un prisonnier ou des opposants contraint de vivre hors du pays. C’est le cas du président Sassou qui maintient dans les geôles le général Mokoko, Patrice Talon a fait condamner Lionnel Zinssou et lancé un mandat d’arrêt internationale contre son ancien allié Sébastien Ajavon. Mahamadou Issoufou a fait emprisonner son ancien allié d’hier devenu opposant Hama Amadou. Paul Biya lui avait comme prisonier Maurice Kamto qu’il a fini par libérer. Macky Sall avait Kalifa Sall qui est certes en liberté mais déchu de certains droits civils et politques tout comme Karim Wade qui vit pratiquement en exil.
L’affaire Soro
Au moment où nous mettons sous presse cet article, c’est la Côte d’Ivoire dirigée par le libéral Alassane Ouattara qui fait la une de l’actualité internationale avec le feuilleton juridico-politique enclenché par le régime d’Abidjan contre Guillaume Soro l’ancien président de l’assemblée en rupture de banc avec alassane Ouattara qui use de tous les moyens pour écarter un candidat redoutable. Le dernier rapport d’Amnesty international sur la Cote d’Ivoire publié le 8 janvier conclu que ; toutes les procédures illégales diligentés contre Guillaume Soro et certains de ses proches à dix mois de la présidentielle sont suspectes et ont un fondement politique.
Au regard de tout ce qui précède, il sied de souligner que la méthode d’instrumentalisation du pouvoir judiciaire pour persécuter les opposants politiques en Afrique obéissent aux mêmes stratagèmes: faire fabriquer des preuves montées de toutes pièces contre les opposants et les accuser ensuite de tentative de déstabilisation. Une technique surannée, datant des années 1960 et de l’époque des régimes autocratiques des partis uniques, où pour accuser des adversaires politiques, on découvrait subitement des armes chez eux ou alors on les accusait d’être soutenus par des puissances extérieures pour renverser les régimes en place.
En effet , sur le fond, de toutes ces pratiques, il y a incontestablement une politisation de la justice qui s’est aggravée sous le règne des présidents autrefois connus comme des démocrates quand ils étaient opposants.
Dans la plupart des pays suscités, les parquets sont entre les mains du ministre de la Justice et qui a vocation à s’attaquer de manière systématique à l’opposition n’hésite pas d’instruire sur ordre du président de la République le procureur qui relève de sa tutelle pour incriminer abusivement les opposants .
La violation du principe de la séparation du pouvoir
La justice symbole de l’équilibre démocratique ne doit pas servir d’arme politique pour écarter les opposant de l’arène politique avec pour finalité pour les empêcher de concourir aux élections présidentielles . Un seuil est en train d’être franchi dans l’arène politique africaine. C’est ce que l’on appelle la tactique du « lawfare ». Il s’agit de l’instrumentalisation de la justice pour éliminer les concurrents politiques. C’est en effet la méthode utilisée aujourd’hui par Alassane Ouattara contre Guillaume Soro, comme il l’a déjà fait récemment contre Gbagbo et Blé Goude acquitté par la CPI mais condamné a posteriori à de lourdes peines par la justice ivoirienne .
Au terme de notre analyse, il sied d’interpeller les organisations de défense de droit de l’homme à ne ménager aucun effort afin de faire cesser cette scabreuse méthode qui détruit les valeurs partagées fondées sur l’équité, la justice, la liberté d’expression et la compétition démocratique basée sur des élections ouvertes. Les procès politiques sont révolues .
Rodrigue Fenelon Massala
Grand Reporter