Les conclusions de l’audit de la Commission confirment le conflit d’intérêts du Premier ministre tchèque Babiš, que le Parlement a soulevé dans plusieurs résolutions et rapports de décharge.
Dans un projet de résolution adopté mercredi par 26 voix pour, aucune contre et 4 abstentions, la commission du contrôle budgétaire appelle la Commission européenne à traiter le conflit d’intérêts parallèlement aux rapports liés à l’influence du Premier ministre Babiš sur les médias et le système judiciaire tchèques. Les députés souhaitent que toute violation présumée de l’État de droit fasse l’objet d’une enquête et, en cas de confirmation, que le mécanisme de conditionnalité pour la protection du budget de l’Union soit activé.
Craintes concernant l’État de droit
Dans leur rapport, les députés font remarquer l’absence d’initiative du gouvernement tchèque pour remédier au conflit d’intérêts. Ils citent les tentatives signalées du gouvernement, en mars 2020, de légaliser le conflit d’intérêts d’Andrej Babiš par le biais d’une législation ad hoc. Par ailleurs, ils s’inquiètent de la pression politique exercée sur les médias tchèques indépendants ainsi que de la démission du procureur général, qui a déclaré avoir quitté ses fonctions en raison de la pression du ministre de la justice.
Le projet de texte émet de « sérieux doutes sur l’indépendance des autorités tchèques » chargées de de la distribution des paiements agricoles directs et demande à la Commission européenne d’ouvrir une procédure d’audit sur la gestion du fonds d’intervention agricole de l’État.
Les citoyens tchèques ne devraient pas payer pour le conflit d’intérêt de M. Babiš
La commission parlementaire condamne la pratique consistant à retirer des projets du financement européen pour les financer via le budget national lorsque les auditeurs de la Commission ou de l’UE détectent des irrégularités. Les citoyens tchèques ne devraient pas payer pour le conflit d’intérêt du Premier ministre, estiment les députés. Ils demandent que les entreprises du groupe Agrofert remboursent toutes les subventions reçues illégalement de l’UE ou des budgets nationaux tchèques, et qu’elles cessent de verser des fonds européens aux entreprises contrôlées par M. Babiš ou d’autres membres du gouvernement tchèque, jusqu’à ce que les cas de conflit d’intérêts soient entièrement résolus.
Andrej Babiš ne devrait pas négocier sur le budget de l’UE tant qu’il est en conflit d’intérêts
Les députés trouvent inacceptable que le Premier ministre tchèque ait participé, et participe toujours activement, aux négociations du Conseil sur le budget et les programmes de l’UE, notamment aux négociations sur la politique agricole commune, tout en continuant à recevoir des paiements agricoles de l’UE via les sociétés du groupe Agrofert. « Aucun ministre, membre ou représentant d’un gouvernement national ne doit participer à des négociations alors qu’il est concerné par un conflit d’intérêts », précisent les députés.
Faiblesses systémiques du reporting de l’UE
Le projet de résolution critique la longueur du processus d’audit de l’UE, les procédures contradictoires ainsi que les procédures de correction financière qui durent depuis plusieurs années. Les députés demandent une révision des règles pour permettre des conclusions plus rapides et le recouvrement des fonds européens indûment versés, ainsi qu’un format standardisé et accessible au public, tel qu’un système numérique et interopérable de communication de données et de suivi en vue de divulguer les bénéficiaires finaux des versements de la PAC.
Citation
La rapporteure Monika Hohlmeier (PPE, DE) a déclaré: « Il est inacceptable de voir comment des structures oligarchiques se sont développées, consolidées et enrichies grâce aux fonds européens et nationaux tchèques. Les eurodéputés ne peuvent pas, et les États membres ne devraient pas, tolérer que des personnes ayant un conflit d’intérêts évident décident de la programmation et de la distribution des fonds communs agricoles et de cohésion. Les milliardaires ne devraient plus avoir la possibilité de recevoir des centaines de millions de subventions de l’UE. »